Fanny Testas et Sonia Saroya · 2024 - 2025

01.01.24–01.12.25

Le sable se caractérise par sa capacité à s'écouler prend un grain de sable comme point de départ d’un voyage, entre enquête documentaire et dérive poétique, étude de terrain et fouille archéologique. Les artistes Sonia Saroya et Fanny Testas suivent le chemin du sable, de sa formation à son extraction, aux différentes transformations et strates d’histoires qui en découlent. Elles mènent un travail de recherche au long cours, en prenant comme ancrage la forêt de Fontainebleau, où le sable y est le plus fin du monde. L’enquête dont il est question dans ce dossier mènera les artistes à produire plusieurs formes, une installation permettant de transmettre leur recherche et travailler la matière. 

Le sable est capable, lorsque l'on creuse ses origines et usages, de faire remonter à la surface diverses histoires comme les liens entre le cosmos, la nature et les humains ; de l’histoire de l’industrialisation jusqu’à la crise écologique actuelle, que les artistes souhaitent conter. Étudier le passé, pour mieux comprendre le présent et anticiper le futur. 

Formellement, l'installation se compose d’un ensemble de trois enceintes qui diffusent simultanément trois compositions sonores pensées pour se mixer dans l’espace. Ces enceintes, considérées comme trois voix de l'histoire du sable et de la forêt de Fontainebleau, sont construites en matériaux issus des processus de transformation du sable. La première est en grès, la seconde en verre et la troisième en béton. Elles imitent les morphologies hétérogènes des grains de sable. Disposées au sol, les enceintes forment un espace sonore au sein duquel sont placées des assises qui s’inspirent de la forme et des textures des roches et formations géologiques de la forêt de Fontainebleau. 

Ces éléments sont construits en collaboration avec différents artisans et techniciens, spécialistes dans leur domaine, c'est-à-dire, la céramique, le soufflage de verre, la construction de décors, la création lumière, l'électronique et la spatialisation du son. 

Ce projet est lauréat 2024 du Fonds régional pour les talents émergents (FoRTE), financé par la Région Île-de-France.

Sonia Saroya

Après une licence et un master Média, Design et Art Contemporain à l’Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis, Sonia Saroya développe un univers fragile et discret où les paysages, les environnements souterrains, industriels ou naturels résonnent avec des questionnements issus des sciences humaines, de la philosophie et des technologies low-tech. Son travail est constitué d’installations qui se situent à la frontière de la sculpture, des arts numériques et sonores. Elle crée des sculptures sonores mêlant façonnage de bijouterie et circuit électronique ainsi que des dispositifs sonores autonomes, sorte d'œuvre-outils, permettant de créer parcours et balades sonores. Ainsi, elle cherche à questionner les paradoxes de nos sociétés contemporaines tout en reconsidérant nos possibilités d’action et nos savoir-faire. 

Elle a par exemple créé l’installation Dérives (2021, MAGCP, 2022 collection du CNEAI). Celle-ci se compose d’une série de dispositifs autonomes, qui se fondent dans le paysage urbain, destinés à délivrer de manière aléatoire extraits littéraires, pensées philosophiques ou paroles de chercheurs et de scientifiques dans l’espace public. Se questionnant sur le rapport magique que l’on entretient avec nos dispositifs technologiques, elle a créé un cabinet de Curiosité Minérale (2020, collection Mallapixels, département du Val-de-Marne) qui rend visible les propriétés des minéraux à l'origine des processus de miniaturisation qui participent à rendre ces objets incompréhensibles dans leur fonctionnement interne. Cette démarche de recherche autour de l’histoire et des particularités des composants électroniques se prolonge à travers le projet Derniers Souffles (2021, DICRéAM de recherche). Cette installation rend audible le souffle d’anciens composants, aujourd’hui considérés comme obsolètes, pour créer des paysages sonores, simulacres d’espaces naturels. L’un des enjeux de cette installation est de réunir et d’exposer le corpus de recherche lié à ces composants et ainsi créer un parallèle entre évolution technologique, industrielle et sociétale. En parallèle, elle travaille à la réalisation du projet Bruit de fond (2022, DICRéAM de recherche). Ici, sont réfléchis et prototypés une série de 5 œuvres-outils liées à la diffusion autonome du son. En avril 2023, ces prototypes permettent la réalisation d’une balade sonore sur le massif de l’étoile à Marseille, en collaboration avec l’Embobineuse et les deux musiciennes Diane Barbé et Mihaela Trifa. Une marche de 3 heures où l’on raconte un paysage à travers une composition, tout en le traversant. 

Sonia Saroya s’implique aussi dans l’organisation de projets collectifs indépendants. En investissant des lieux en marge, elle explore des manières de déconditionner l'expérience à l'œuvre, au lieu, tout en interrogeant les rapports artistes/publics. En parallèle, elle défend l’accessibilité de ses pratiques en partageant réflexions, techniques et outils lors de missions d’enseignement. 

Fanny Testas

Née en 1994, Fanny Testas vit à Paris et est artiste et curatrice indépendante. Elle co-coordonne la webradio Station Station depuis 2021 et est inscrite au Conservatoire de Pantin en classe d’électroacoustique depuis 2020. Après avoir étudié les arts plastiques à l’Université Paris 8, Fanny explore les pratiques de l’exposition à l’Académie Royale des Beaux-Arts de Bruxelles. À travers ses projets artistiques et curatoriaux, elle est engagée dans le partage des savoirs et pratiques, la collaboration et l’équité.

Que ce soit dans ses pratiques artistiques ou curatoriales, Fanny travaille souvent autour du médium son et de l'écoute. Elle cherche à questionner, via le sonore, nos rapports à nos environnements à l’ère de l’anthropocène ou du Chthulucène défini par Donna Haraway. Elle pense le sonore comme outil d’expression et de création au service du commun. Ainsi, lors d’enquêtes de terrain et dans un postulat démocratique, elle tend son micro à tous·texs afin de récolter voix et objets sonores, matière première de ses installations, créations sonores et documentaires radiophoniques. Elle expérimente différents dispositifs d’écoute et explore comment donner à entendre au sein d’une exposition. 

Ces dernières années, elle a construit en collaboration avec d'autres artistes des dispositifs qui stimulent les rencontres et dialogues, tels le chariot de diffusion et enregistrement sonore la Caravane des anamnèses avec Lola Barrett (2021, Liège et Herstal, Belgique, bourse Un futur pour la Culture du ministère de la Culture belge) ou l’installation d’écoute des paysages sonores aquatiques Hors flow avec Lola Barrett et Joanne Samson (2021, Résidence de recherche et production Station Flottante du Collectif MU sur l'Urban Boat, Oise, France / 2021, Musée de l’éphémère d’Herstal). 

En parallèle, elle curate plusieurs expositions dont en 2023 L’horizon des événements - un cycle autour des liens entre l’art et la science-fiction - présentant trois solo shows des artistes Vava Dudu, Fanny Taillandier et Lola Barrett à l'Institut français Berlin. Elle prépare pour 2025 un nouveau programme curatorial intitulé The Tuning of the Afterworld à l’Ensa Bourges, qui présentera une exposition, des workshops, conférences, concerts, performances, etc.